La Grave, petit village au pays de la Meije

Massif des Écrins, France

Le village de La Grave est niché à 1500 mètres d’altitude, dans les Alpes, au cœur du massif des Écrins. L’hiver, la neige recouvre tout. Mais la torpeur n’est qu’apparente car ce village est un point de ralliement pour tous les fous de glisse, skieurs chevronnés et adeptes du freeride.

La Grave, l’un des plus beaux villages de France

Ici les hivers sont rudes, avec un climat tranché et un relief très accidenté. Cela a créé de fortes personnalités, des mentalités de montagnards que l’on retrouve dans le village de La Grave, un village qui a connu de vraies évolutions avec, en 1880, l’ouverture de la route du Lautaret qui a désenclavé la vallée. Depuis quelques années, l’ouverture au monde de La Grave est permise par ce magnifique massif de la Meije qui est, selon les freeriders, un des plus beaux spots en Europe pour venir faire du ski en toute liberté.

Le massif de la Meije culmine à 3900 mètres. Les hommes ont choisi de s’installer sur le versant sud. Ils se sont adaptés à la pente pour y bâtir leurs maisons et y cultiver leurs terres. En face, c’est le territoire des freeriders, ces skieurs d’altitude que les grands espaces naturels d’altitude n’effraient pas.

Le patrimoine naturel de La Grave

Chaque village a son patrimoine et le patrimoine de La Garde, il est d’abord naturel. Les montagnes tout d’abord, avec ces sommets à plus de 3000 mètres dominés par la Meije, peut-être l’une des plus belles montagnes du monde. La faune également, repérable par les empreintes laissées dans la neige qui désignent ici un chevreuil venu déguster quelques baies au cours de la nuit. Plus loin, on trouve des traces de lièvre et juste derrière, celles du renard.

Le parc national est d’abord un territoire protégé. Il y a 30 ans, la montagne en hiver n’était fréquentée que sur les pistes de ski. Aujourd’hui, avec des pratiques sportives nouvelles, comme le ski de randonnée, il est nécessaire de sensibiliser les pratiquants, de ne pas aller au contact de la faune par exemple. C’est le rôle des quelques gardes-moniteurs du parc national qui sillonnent ici et là la montagne pour informer et éduquer face à la fragilité de l’écosystème.

Cette nature évolue et doit être protégée au fil des saisons. Au printemps, c’est le moment où tout explose au niveau de la flore, mais les animaux ont également peu de temps pour se reproduire puisque c’est le moment de l’accouplement chez la plupart des espèces.

Au moment du dégel, le parc national est méconnaissable. C’est le moment que choisissent les gardes pour recenser la population animale. Les chamois apprécient que l’hiver se termine tôt, cela fait baisser leur taux de mortalité dû au manque de nourriture. Le bouquetin des Alpes quant à lui n’est plus une espèce menacée, même s’il doit quand même être surveillé de très près. En effet, son cousin, le bouquetin des Pyrénées n’a pas eu la même chance et a disparu en l’an 2000.

L’église de La Grave

En hiver, seule l’église émerge au milieu du manteau neigeux. De style roman-lombard du XIe siècle, elle est le témoin le plus ancien d’une présence humaine dans la région. À côté, on a redécouvert récemment une chapelle des Pénitents Blancs datée du XVIIe siècle. Cette discrète confrérie de catholiques laïcs venue d’Italie au Moyen-Âge est toujours active aujourd’hui.

À La Grave, comme souvent dans les villages de montagne, il y a le cœur du village et, à flanc de coteau, le hameau des Hières, lieu d’estive où les paysans se rendent l’été avec leurs bêtes. On y pratique encore des traditions ancestrales comme la fabrication de combustible à base de fumier de mouton. Ce combustible ne sert plus aujourd’hui au chauffage des maisons mais est toujours utilisé pour la cuisson du célèbre gratin dauphinois.

Un nouveau souffle pour La Grave

La vie à La Grave a été difficile des siècles durant. La relative pauvreté, la rudesse du climat d’altitude et ce village accroché à la pente ont forgé les caractères. Toutefois, un réel changement s’est opéré puisqu’on est passé d’un village enclavé à une destination connue presque du monde entier, où l’on vient pratiquer le freeride. Cela a apporté un souffle nouveau au village.

Aujourd’hui le soleil brille sur la petite station des Hautes-Alpes. À 3200 m, au sommet, -15°C, un vent nul et une visibilité parfaite. Le téléphérique emmène les fous de glisse en 40 minutes au pied du glacier de la Girose. C’est l’une des plus vieilles remontées mécaniques de France, juste après le téléphérique de l’aiguille du Midi.

Tout en haut, c’est le contact direct avec la nature. Pas de pistes balisées, pas de déclenchement préventif d’avalanche, juste la rencontre du skieur et de la poudreuse. Tous sont équipés de l’appareil indispensable du skieur hors-piste, une balise émetteur-récepteur permettant de retrouver quelqu’un qui aurait eu un problème avec une avalanche. En dépit des dangers, c’est sur cette neige vierge dans cette nature sans limite que viennent skier les freeriders.

Les pisteurs-patrouilleurs comme Pascal veillent au grain. « Au-delà de l’info que l’on donne en bas sur la terrasse, à partir de la mi-journée, on patrouille sur le domaine. Les gens peuvent monter avec le téléphérique et à partir du moment où ils sortent des raquettes avec les cordes autour de nous, ils sont sur un domaine de haute montagne, non sécurisé. »

Situation de La Grave

Galerie Photos

Le massif de la Meije vu depuis La Grave

Le massif de la Meije vu depuis La Grave

Cimes enneigées

Cimes enneigées dans le massif de la Meije

Banc face à la Meije

Banc face à la Meije sur les hauteurs de La Grave

L’église de La Grave

L'église de La Grave est classée Monument Historique

“ Aujourd’hui, notre espèce est la plus représentée sur Terre, et notre présence se fait au détriment de la nature. ”
Éric, garde du parc national des Écrins

Des freeriders du bout du monde

Pour s’adonner à sa passion, Tony n’hésite pas à traverser l’Atlantique. « J’adore La Grave. Je passe 4 mois par an à La Grave et le reste du temps, je vis en Alaska. J’ai beaucoup travaillé pour des compétitions de ski professionnel. Pour le freeride, les États-Unis sont devenus très restrictifs. Par exemple, 100% des gens qui s’entraînent ici seraient mis en prison aux États-Unis. Ce qu’il faut comprendre, c’est que ne pas avoir de limite n’est pas un problème. Ce sont des professionnels de leur art et tous les arts supposent des émotions fortes. »

Il y a plus de 20 nationalités différentes qui viennent skier à La Grave, et ce depuis longtemps. Suédois, Norvégiens, Suisses, Allemands, tous convergent vers La Grave et tout se passe bien. Tous se retrouvent autour de la montagne avec le même discours, la même envie, la même passion.

Le Club Alpin Français de Briançon a commencé à construire des refuges en 1875. En 1894 eut lieu l’inauguration du refuge Évariste Chancel qui fait partie du patrimoine de La Grave. À l’époque, ce refuge était utilisé par les guides qui montaient de La Grave avec leurs clients et partaient en direction des sommets comme le Râteau Est ou le Dôme de la Lauze.

Un village de légendes

Les jours de neige ici, on s’aperçoit d’un phénomène rare : les flocons de neige ne tombent pas verticalement, mais horizontalement. Parce qu’ils sont balayés par le vent, un vent très présent dans la vallée et dans l’histoire du village, à tel point qu’on le retrouve dans les légendes et la tradition orale dont les enfants sont friands.

« Auparavant, les femmes allaient laver leur linge au lavoir Saint-Martin. Ce jour-là, le vent était si fort que ces femmes ne pouvaient avancer. Une fée apparut et promit d’arrêter le vent si une des lavandières lui donnait son tablier. Aucune n’accepta car ce tablier était leur seule richesse. De colère, la fée décida alors qu’un vent permanent soufflerait sur le village. »

Cette légende, aujourd’hui racontée aux enfants par une conteuse du village, était autrefois une tradition orale lors des veillées. En effet, l’hiver était un moment d’inactivité et les veillées étaient un moment important où l’on se retrouvait entre amis, en famille. Tout le monde était rassemblé autour du feu et chacun avait des activités différentes : les hommes réparaient leurs outils en prévision du printemps, les femmes filaient la laine, et il y avait toujours un grand-père ou une grand-mère qui gardait les enfants et leur racontait des légendes.

L’habit traditionnel est noir. Dans cette vallée qui vivait en autarcie, tout le monde était vêtu de noir, on se mariait en noir. En effet, dans chaque troupeau de moutons, il y avait des moutons à la laine noire. Alors, les paysans vendaient la laine blanche et gardaient pour eux la laine noire, sans avoir besoin de la teindre. À La Grave, le mouton noir n’était pas synonyme de poisse, bien au contraire, il fallait avoir un ou deux moutons noirs dans son troupeau, cela portait bonheur.

Le village de La Grave, autrefois coupé du monde, compte aujourd’hui de nouveaux habitants, attirés par ce décor somptueux. C’est le cas de Jacques, un ancien citadin. « Je suis venu chercher un peu de moi-même ici. En ville, on a un côté un peu superficiel, anonyme. Quand on arrive ici, la nature nous prend à bras le corps, et chez les gens il y a pas mal de bon sens. Ils sont en osmose avec la nature. Maintenant les jeunes arrivent à s’épanouir mais auparavant, la montagne était plus une question de labeur que de plaisir. »

Au printemps, Jacques reprend le chemin de son hameau, les bras chargés de poutres. Il n’a jamais abandonné durant les 17 dernières années, même si les nuits difficiles, la baisse de motivation et les regards incompréhensifs des gens du village l’ont parfois fait douter.

Voir la Meije est extraordinaire, il ne passe pas un jour sans que Jacques ne la regarde. Même la nuit, durant la pleine lune, la neige brille et il se lève pour la contempler. Passer trois jours en ville lui rappelle pourquoi il est là, dans ce décor digne d’un film.

La blancheur immaculée des cimes, l’alternance des saisons, l’omniprésence de la nature, le contact avec ces fous de glisse venus d’ici et d’ailleurs, des traditions ancestrales et une histoire bien ancrée font que La Grave mérite amplement son label Plus Beaux Villages de France. Ceux qui viennent à La Grave y reviennent, pour une fois ou pour toujours.

La Grave en quelques chiffres

  • Population : 487 (2014)
  • Point haute : La Meije, 3983 m
  • Commune traversée par le 45e parallèle Nord
  • À 83km de Grenoble

Galerie Photos

Le village de La Grave sous la neige

Village de La Grave sous la neige en hiver

Chapelle à La Grave

Chapelle à La Grave, face à la Meije et au Râteau, dans le massif des Écrins

L’église avec vue sur la Meije

Entrée de l'église à La Grave

Le téléphérique de La Grave

Le téléphérique de La Grave

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