La montagne enchantée, Banahaw, un lieu empreint de magie

Philippines

C’est un volcan éteint, à une centaine de kilomètres au sud de Manille. Un lieu gorgé d’eau et noyé par la brume. Attirées par ses versants luxuriants, près d’une centaine de communautés y ont élu domicile. Banahaw est son nom.

Tous les jours, June attend les visiteurs au pied du mont Banahaw, près de la cascade sacrée. Au gré des rencontres, June s’improvise guide pour les pèlerins ou les quelques touristes qu’il croise en chemin. Mieux vaut ne pas se fier aux apparences. Malgré ses tongs usées, il crapahute dans la jungle avec agilité. Installé ici depuis plus de dix ans, il connaît tous les chemins de traverse et conduit les curieux entre les banyans – ces arbres gigantesques et sacrés – et les lianes, auprès des communautés retirées, à la découverte des caves cachées et des lieux de culte reculés.

Aux Philippines, tout le monde connaît le mont Banahaw. Et pour cause : près d’une centaine de sectes ont élu domicile au pied de ce massif embrumé et baigné par les pluies la majeure partie de l’année. Au beau milieu d’une nature prolifique, elles se consacrent au culte d’esprits, divers et variés, et confèrent au lieu une ambiance unique, tantôt mystique, tantôt illuminée.

Amulette magique

Parmi elles, les rizalistes vénèrent José Rizal, le héros et poète révolutionnaire national exécuté par les colons espagnols en 1896, en qui ils voient le dernier prophète. À Kinabuhayan, la secte de Tatlong Persona Isang Diyo est l’une des plus importantes. Elle possède un grand domaine, réunit 14000 membres et plus d’une cinquantaine d’églises dans tout le pays.

Selon sa grande prêtresse, il faut se tenir prêt, car le royaume des cieux s’installera bientôt au mont Banahaw. Pour preuves, les traces de pas et de visages laissés dans la roche, au bord de la rivière. Chaque jour, de nouveaux pèlerins viennent s’y recueillir.

Mais d’autres communautés, plus petites, ont également proliféré. Comme celle de June, elle se réclament du catholicisme « spirituel ». Ce sont plutôt des lieux de vie communautaires. Dans un pays très superstitieux, où près de 90 % de la population est catholique, toutes ont leurs histoires riches de formules magiques à scander contre le mal, de guérisseurs légendaires et de plantes aux pouvoirs insoupçonnés. Sur lui, June porte ainsi toujours un petit morceau de bois, une amulette magique qui le protège du mauvais oeil… « et des balles », ajoute-t-il.

Quête d’expériences

Mais au-delà des différences de croyance, toutes les communautés louent le caractère exceptionnel de Banahaw. À les écouter, un transfert aurait eu lieu. Le mont serait devenu la nouvelle Jérusalem. Les pèlerins y affluent, principalement de Manille, en quête d’expériences. Ils viennent y cueillir des herbes, brûler des cierges, se baigner ou boire l’eau de la montagne à laquelle ils attribuent toutes les vertus, en particulier celles de soigner les yeux, le dos et les maux de ventre.

Car à Banahaw, l’eau est omniprésente. Sur les pentes de ce volcan éteint culminant à 2 158 mètres d’altitude, la roche a sculpté des chaos. Poreuse, la montagne s’effondre dans des gorges. Infiltrée dans les plis et les replis, l’eau se faufile partout. Elle surgit en source, dégringole en cascades, s’unifie en ruisseaux et donne naissance à une végétation luxuriante où plantes et fleurs éclatent de couleurs pour attirer botanistes, phytothérapeutes et… guérisseurs.

Lagundi et Banaba

« Aux Philippines, le mont Banahaw, c’est le Vatican des guérisseurs, un haut lieu de la médecine par les plantes, explique Bibiano Boy Fajardo, auteur d’un livre sur les techniques de guérison et lui-même guérisseur. Parmi les espèces fétiches, nous utilisons la feuille de lagundi bouillie contre la toux, ou celle de banaba pour améliorer la circulation sanguine. »

June collecte lui aussi branches et feuilles pour se soigner. Dans un des pays les plus pauvres du monde, il n’a de toute façon pas assez d’argent pour aller consulter un médecin. Fier, il ne demande rien aux visiteurs qu’il accompagne sur les chemins. Libre à eux de lui donner quelque chose, s’ils le souhaitent.

Ancien militaire, il reste silencieux sur son passé. Il raconte seulement être venu trouver le repos avec sa femme, ici, au pied du mont Banahaw. Tess, une de ses amies de Manille, en visite pour le week-end, témoigne. Non loin de son petit autel, elle se décrit comme catholique spirituelle : « Il se passe vraiment quelque chose ici. Si j’ai des problèmes, je viens. Je prie, je me baigne. Je bois de l’eau à la source alcaline et tout de suite, je me sens mieux. Pour moi, il n’y a aucun doute, cette montagne n’est pas comme les autres. »

Infos pratiques

  • Aussi appelé mont Banáhao ou Majaijai
  • Situé sur l’île de Luçon, aux Philippines
  • Altitude : 2 158 mètres
  • Activité volcanique : éteint

Galerie Photos

Coucher de soleil sur le mont Banahaw

Coucher de soleil sur le mont Banahaw

Prières et recueillement

Prières et recueillement au mont Banahaw

L’eau est omniprésente

L'eau est omniprésente au mont Banahaw

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